Critique : Billy Lynn's Long Halftime Walk (2016)

Genre quasi inépuisable, les films de guerre portent de nos jours un regard différent de l’héroïsme des soldats luttant pour la paix et leur pays. Dans un cinéma principalement américain où l’on présente des héros torturés, traumatisés et hantés par leurs actions et l’horreur de la guerre ; on constate que cette tendance essentiellement politique et ayant pour but de sensibiliser le public, dégage une certaine fraicheur à force de présenter une idéologie d’une réalité bien triste. 
Alors que l’impact moral, psychologique et physique de la guerre sur des soldats est souvent montré sous un angle intimiste autour des liens fragiles entre le personnage principal et sa famille (American Sniper par exemple), il est relativement rare de voir un long métrage traitant la confrontation entre deux visions très différentes de ce fait d’actualité : l’une voyant la guerre comme un moyen permettant d’avoir une fierté aveugle pour son pays, l’autre comprenant parfaitement l’enfer, les conséquences et l’horreur des combats

C’est à travers ce contexte qu’Ang Lee porte à l’écran une adaptation d’un livre développant la rupture entre deux réalités différentes de l’un des cancers de l’humanité. Billy Lynn's Long Halftime Walk est-il une nouvelle relecture utile autour de l’idéologie américaine sur la guerre ? C’est ce que nous allons voir… 



En 2005, Billy Lynn, un jeune soldat américain se retrouve du jour au lendemain symbole de l’armée des Etats Unis d’Amerique après que lui et ces compagnons d’armes ont réussi à survivre d’une violente attaque en Irak orchestrée par des terroristes. Rapatrié avec ces partenaires au Texas pour promouvoir les mérites des soldats de son pays lors d’un match de football américain, Billy Lynn se retrouvera dans des situations où ses repaires entre la réalité et ces souvenirs de combat se mélangeront.

Réalisé sous un format filmique unique en son genre (4k 3D et en 120ips (images par seconde)) afin d’obtenir un rendu visuellement plus saisissant que les formats standards d’autres productions, les problèmes d’exploitation du film et le très faible nombre de cinémas équipés pour ce type de film ont posé un très lourd fardeau pour le long métrage d’Ang Lee. En dehors d’une projection limitée au minimum syndical (2D et 24 ips), il est toutefois possible de se rapprocher du film à son état d’origine via une édition Blu-Ray 4k et en 60ips. La critique de Billy Lynn's Long Halftime Walk sera basée sur cette édition sans que les conditions techniques puissent avoir une valeur importante sur l’avis du film. 

La relation personnelle entre Billy (Joe Alwyn) et sa soeur Kathryn (Kristen Stewart) est souvent mis à rude épreuve à cause de leurs positions opposées sur l'engagement de l'Armée Americaine.


A l’image d’une grande partie de sa filmographie, Ang Lee se concentre principalement sur l’humanisme de ces personnages avant de se focaliser sur son scénario. Cette manière de concevoir ces films fait que Billy Lynn's Long Halftime Walk est un film traitant avant tout de la complexité de ces personnages principaux à retrouver leurs repères face à une société qui les voit autrement. Cela se remarque sur la vie familiale de Billy Lynn où ce dernier entretient une relation solide avec sa sœur au niveau de leur attention pour l’un à l’autre, mais aussi fragile concernant les visions opposés sur la politique de l’armée des Etats Unis. Le fait que Billy Lynn et ces coéquipiers soient présentés comme des personnages inconsciemment dépassés par la rupture entre leur passé traumatisant des batailles contre le terrorisme, et la société américaine qui se montre tout aussi perverse qu’accueillante 
envers eux, permet au film d’offrir plusieurs points du vue fascinants sur le thème principal du long métrage. 
Bien que son rythme très calme se retourne contre le film avec quelques longueurs pesantes, Ang Lee prend volontairement le temps d’instaurer les éléments de base de son long métrage afin d’offrir une vision assez clair sur le sujet de son long métrage. En jouant habilement avec des plans larges et serrés suivant le contexte des scènes, le réalisateur taïwanais opte pour une mise en scène intimiste et donnant une dimension plus mémorable aux messages qu’il souhaite véhiculer.

La frontière entre deux mondes différents peut être 
plus proche que ce que l'on pense.

Avec une version proche du matériau d’origine, voir Billy Lynn's Long Halftime Walk sous une configuration 4k + 60ips permet de mieux saisir les choix d’une réalisation unique en son genre grâce en grand partie à sa mise en scène qui est bien plus imposante et intéressante que sous un format standard de 24ips. Jouant avec le cynisme des mentalités américaines, Ang Lee parvient à la fois à véhiculer des messages sur l’Amérique d’aujourd’hui, mais aussi sur le fonctionnement d’Hollywood a toujours vouloir surenchérir 
des histoires vraies manquant de surréalisme ou d’héroïsme pour que cela soit vendeur pour le public américains. 
Sur le papier, le casting proposé pour ce long métrage est très mix entre grands noms du cinéma et jeunes acteurs méconnus, et le choix est de très bonne qualité : Joe Alwyn (The Sense of an Ending) campe avec le brio le rôle de Billy Lynn en apportant une certaine fragilité à son personnage ce qui rend ce dernier très touchant et surtout humain ; Vin Diesel (Pitch Black) surprend aussi sous un rôle radicalement différent de ces habitudes d’acteur et assez original dans le genre ; Kristen Stewart (Adventureland) s’en sort modestement, faute d’un personnage pas suffisamment présent dans l’intrigue ; Garrett Hedlund (Tron Legacy) convainc sous son profil de sergent en montrant continuellement la fracture entre deux visions opposés des valeurs et intérêts de l’armée américaine.

Passionnant aussi bien sur sa forme que sur son fond, Ang Lee propose un long métrage pas forcément accessible à tous à cause de son ton mélangeant parfois sérieux et satire ainsi que d’un rythme assez posé. Billy Lynn's Long Halftime Walk n’est pas sans maladresse, mais reste un objet de cinéma pertinent où une grande partie des messages introduit par son réalisateur portent un double sens profond qui présente un regard unique sur l’idéologie américaine.


De gauche à droite : Kristen Stewart, Chris Tucker, Vin Diesel, Steve Martin, Joe Alwyn, Garrett Hedlund et Makensie Leigh.


Note : 13/20

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