Critique : Parasite (2019)

Longtemps resté dans l’ombre d’autres pays qui prenaient leur envol et s’affirmer dans leur regard et position sur le fonctionnement de leur continent, la Corée du Sud parvient à s’incruster dans le marché du cinéma politique et à en faire son arme de séduction en l’espace de quelques années. Véritable guerre de positions entre la population et le gouvernement, la Corée du Sud n’a jamais cessé ce conflit interne qui a amené à de nombreuses injustices et falsifications d’informations en tous genres. 

Bien que la corruption et la dangereuse capitalisation du pays soient de moins en moins adhérées par les Sud-Coréens, le cinéma permis à de nombreux cinéastes du pays d’exprimer plus « librement » leurs opinions tout en gardant un avis accessible au-delà des frontières du continent.
Dernier train pour Busan, The Tunnel ou encore Battleship Island, le cinéma de la Corée du Sud passionne dans son approche à évoquer son passé et exprimer une véritable colère contre le fonctionnement actuel du pays. À travers ces réalisateurs qui ne manquent jamais d’ingéniosité et d’audace, Bong Joon-Ho fait partie de ceux qui ont réussi à occidentaliser son cinéma afin de présenter la plupart des problèmes de son pays natal comme un miroir à d’autres continents sur Terre. Après un Okja passionnant et maitrisé de bout en bout, le réalisateur Sud-Coréen revient à l’écran avec un mystérieux long métrage : Parasite. Nouveau coup de maître de la part de Bong Joon-Ho ? C’est ce que nous allons voir…



Les Ki-Taek sont une famille assez pauvre qui vit avec tous les moyens possibles. Lors d’une discussion avec un ami, leur fils se fait recommander pour donner des cours d’anglais à domicile pour les Park, une très riche famille. Les choses ne vont pas se passer comme prévu….


Véritable film dont les énigmes qui l’entourent sont légion et gardées jusqu’à sa sortie en salles (un fait de plus en plus rare il faut avouer), Parasite aime jouer la carte du mystère à chaque scène pour mieux surprendre son public par rapport aux différentes hypothèses possibles. En mettant en place un style d’écriture bien rodé et une mise en scène méticuleuse, Bong Joon-Ho multiplie les clins d’œil à différents genres de films avec malice et ingéniosité, pour à la fois servir son long métrage à plusieurs visages et renouveler intelligemment des thèmes assez classiques dans sa filmographie (le rapport entre les classes sociales par exemple). Jouant sans cesse avec notre regard en nous attirant vers des éléments du décor, Bong Joon-Ho maîtrise à la perfection l’art de la distraction tel un magicien cachant au mieux les mystères de ces tours.



En revenant vers un projet plus « sobre » que ces derniers films, le réalisateur Sud-Coréen porte un regard plus attentif sur ces personnages et ne cherche pas à dynamiser son récit pour le rendre rythmé inutilement. Bien que l’écriture de Parasite souligne l’évolution des messages sociauxpolitiques de Bong Joon-Ho depuis Memories of Murder, le regard sur la Corée du Sud (et accessoirement les autres pays occidentaux) du réalisateur dans ce film passionne autant qu’il frustre. Malgré une volonté propre d’aborder des sujets sous un point de vue au final universel, le long métrage laisse un peu sur sa faim dû au fait à l’amère impression qu’il reste sur la retenue. Fort heureusement, le casting qui tient le film, s’en tire parfaitement pour dresser une vision à la fois honnête, satirique et troublante pour son réalisme à montrer l’aspect social de notre société. Habitué à travailler avec le réalisateur, Song Kang-ho revient 6 après Snowpiercer en grande forme, mais ce sont surtout Park So-dam et Choi Woo-shik qui proposent un jeu d’acteur remarquablement juste et savoureux.

Véritable film a plusieurs visages dont il est impossible de le mettre que dans une simple catégorie de genre, Parasite ressemble à une anomalie cinématographique dans un paysage où les films d’auteurs, à concept et blockbusters formatés s’enchaînent comme une valse. Une anomalie pertinente à l’image de son créateur : délicieusement imprévisible, mais qui est littéralement un reflet sur notre société et surtout vers quoi cette dernière évolue comme étape.
Même si le soin du sous-texte sociétal de notre monde manque un peu d’audace et de profondeur, le réalisateur Sud-Coréen livre une nouvelle fois une pépite remplie d’idées, de personnages incroyablement bien écrits et avec une mise en scène quasi parfaite.


Note : 17/20

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