Critique : Antlers (2021)
Période assez compliquée pour le cinéma d’épouvante-horreur avec énormément de productions se cachant derrière un certain cynisme et un aveu d’échec pour ne pas dévoiler un manque flagrant d’idées et de respect pour ce cinéma.
Même si la traversée du désert pour que ce genre cinématographique retrouve une forme de dignité et un nouvel aura dans le paysage filmique actuel est malheureusement loin d’être terminée, il est toujours intéressant de voir comment certains projets essayent de se détacher des autres longs-métrages uniformes et désincarnés.
Avec un parcours inégal en tant que cinéaste, l’Américain Scott Cooper change complètement de registre 4 ans après Hostiles pour se lancer dans de l’épouvante horreur avec son nouveau long métrage : Antlers.
Est-ce que ce film parviendra à se défaire de la crise d’identité de cinéma de genre ? C’est ce que nous voir…
Plaçant son intrigue dans un contexte économique et social très marqué sous une ambiance lourde où on sent immédiatement d’être dans une ville à l’agonie, Scott Cooper place ces protagonistes dans un long métrage jonglant entre les codes du drame et l’épouvante.
Le résultat est partiellement convaincant du fait de la structure narrative du film problématique à certains moments et au développement de la plupart des thèmes liés aux personnages qui ont des difficultés à trouver un véritable écho avec l’aspect fantastique qui se manifeste progressivement.
En prenant volontairement son temps pour installer le récit, les personnages et déployer le surnaturel de manière naturelle, Scott Cooper se retrouve néanmoins piégé par son propre jeu et en prend conscience brutalement.
Difficile d’expliquer si ce revirement qui survient très proche du dernier acte du film est liée à des raisons de réécritures du script pas très fines, de budget ou tout simplement d’un choix de réalisateur, mais la sensation d’être passé à côté d’un final plus marquant et censé se ressent beaucoup.
Sous une narration à la fois intéressante et manquante de subtilité par moments, les défauts plus ou moins grossiers d’Antlers sont amplement pardonnables grâce à un formidable travail de la mise en scène qui évite sans mal les défauts classiques des films d’épouvante (les scènes quasi illisibles dans des environnements très sombres par exemple) et une photographique magnifiant la beauté troublante de cette ville mourante.
Tout comme dans l’un de ses précédents longs métrages, Out of the Furnace, le réalisateur réussit dans Antlers à immortaliser les zones urbaines en déclin de la ville ainsi que la végétation imposante aux alentours pour offrir cette même sensation de solitude que ses personnages qui vivent dans un lieu qui paraît piégé dans le temps, seul au monde et malade de l’intérieur. Le rendu autant visuel que sonore est d’une qualité irréprochable qu’il est difficile de se souvenir de quand date le dernier film de ce gabarit pouvait se permettre d’installer une atmosphère aussi saisissante et donner une connotation si mémorable.
Le film peut compter aussi sur son casting d’exception et sélectionné avec attention : Keri Russel (Dawn of the Planet of the Apes) et Jesse Plemons (Breaking Bad) offrent un duo intéressant à suivre durant le récit, mais c’est particulièrement le jeune Jeremy T.Thomas qui marque les esprits avec un jeu d’acteur comme on aimerait en voir plus souvent que ça soit dans l’épouvante et d’autres styles cinématographique.
Loin d’être sans défaut et trébuchant à des rares instants, Antlers réussit malgré tout à se tenir droit ce qui le rend paradoxalement touchant et très agréable à voir du fait de ces notes d’intentions qui dépasse totalement le cadre d’une production qui semble généré par des algorithmes. Au-delà de constater que Scott Cooper a mis de son cœur à ce projet, on y voit aussi une forme de reconnaissance pour les classiques de l’épouvante et du drame qui l’ont inspiré, ainsi que pour son public en manque d’un retour de sincérité et de respect pour ce cinéma qui se cherche depuis quelques années.
Note : 15/20
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